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LE CHEVAL EN FRANCE AU MOYEN AGE : sa place dans le monde médiéval, sa médecine : l'exemple d'un traité vétérinaire du XIVe siècle, La Chirurgie des chevaux - Brigitte PRÉVOT - Bernard RIBÉMONT

LE CHEVAL EN FRANCE AU MOYEN AGE : sa place dans le monde médiéval, sa médecine : l'exemple d'un traité vétérinaire du XIVe siècle, La Chirurgie des chevaux - Brigitte PRÉVOT - Bernard RIBÉMONT
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Cet ouvrage, assorti d'abondantes notes, d'illustrations bien choisies, et d'une bibliographie présentée clairement, intéressera tout médiéviste (et tout amoureux du cheval un peu curieux). Il a en effet le grand mérite d'offrir au lecteur une synthèse très documentée et vivante sur la place du cheval dans la société médiévale. Si divers auteurs, par leurs articles ou leurs livres, ont abordé certains de ces aspects — le cheval dans la guerre, l'économie, l'agriculture, la technique, la littérature, etc. — nous ne disposions pas d'une vue d'ensemble présentant un panorama complet sur tous ces sujets. Le cheval est ici abordé, donc, sous divers angles : dans son contexte socio-économique, dans l'écriture, enfin dans la médecine ; dernier point complété par l'édition du traité la Cirurgie des chevaux (avec glossaire), suivie de trois autres textes en annexe. L'introduction présente l'ouvrage en plaçant le cheval dans trois espaces : l'espace social, l'espace littéraire, l'espace du soin. Il ne nous est pas possible, dans le cadre de cette recension, de résumer tout ce qui est développé dans ces pages. Il en ressort quelques points fondamentaux : le cheval est un bien précieux, coûteux, un emblème social, un outil de travail aussi, auquel sont liés guerre, artisanat, commerce, agriculture, etc. Une évolution lente se dessine à partir de l'héritage antique, que ce soit pour les races, l'élevage, le matériel de labour, l'attelage, etc. Les sources documentaires sont souvent peu bavardes ou éparpillées : cartulaires, comptes divers, legs, textes litter aires aussi. On discerne des points forts ou caractéristiques, tels que l'existence d'un commerce de luxe privé, des grandes foires, la prédominance des marchands italiens, la grande estime pour les chevaux espagnols et lombards, l'importance des abbayes dans le commerce et l'élevage, l'existence de haras forestiers, la lente substitution du cheval au bœuf... De nombreux phénomènes existent dès le haut moyen âge ou aux XIe-XIIe s. Le XIIIe s. est un siècle-charnière, où se dessine une politique du cheval. Donnons quelques exemples : Charlemagne dans le De villis se préoccupe de recréer un cheptel de qualité (la situation étant catastrophique et les Francs utilisant les chevaux au combat) ; le ixe s. voit l'introduction de la ferrure à clous ; l'élevage existe au monastère de Berdoues (Gers) avant 1150 ; le mot haracium apparaît en Normandie au xiie s. ; à cette même époque existe à Troyes un cursus equorum, emplacement réservé pour le commerce équin. À partir de la fin du xine s. apparaissent écuries et haras royaux. Le cheval de guerre doit être grand et fort : on a introduit après le vine des races orientales plus grandes (chevaux perses, chinois, de Bactriane). L'histoire du harnachement est lié lui aussi à l'évolution de l'art militaire. Son prix ajoute au coût de l'entretien du cheval ; il est pris en compte dans la littérature. Les diverses pièces : selle, étriers, mors, éperons (longs et souvent blessant l'animal, mais semblant réservés à l'usage guerrier), fers, protections de fer pour les combats, sont évoquées et décrites avec l'appui des textes littéraires qui donnent une idée de la variété et de la richesse de certains équipements (cf. par ex. p. 140 et 141, où est décrite une selle de dame, celle d'Enide). Le vocabulaire reflète la diversité sociale et celle de l'usage, « l'importance des équidés et leur fonction identificatrice». Le terme cavallus apparaît au VIe s. dans le sens de « cheval de selle ». On distingue le destrier (destrarius, qui n'apparaît qu'au début du XIIe s.), cheval de combat ; le palefroi, cheval de voyage ; le coursier, cheval rapide de qualité ; le roncin, cheval de selle médiocre ; le sommier, cheval de bât en général. Le terme « auferrant » de l'arabe «al faras» (cheval) est presque exclusivement réservé à la chanson de geste (fin XIIe déb. XIIIe s.). La jument est avant tout bête de somme et monture dégradante. Le poulain peut être un petit cheval de basse condition ; la haquenée (de Hackney, village anglais où l'on élevait des chevaux réputés) est un cheval de marche pour femme ou clerc. Le « chaceor » rapide et robuste, est attribué au veneur de façon privilégiée. Dans l'iconographie l'attitude du cheval est signifiante : cheval au galop pour le guerrier, cheval au pas, courtois, pour la dame. Le cheval identifie le personnage et dans la littérature donne des points de repère à l'intérieur du récit. Le cheval du héros doit souvent son nom, entre autres origines, à la couleur de sa robe. Le cheval littéraire est un cheval idéal, qui rarement mange, boit, etc. C'est un cheval emblème, un cheval valeur, un cheval souvent peu réel. Les couleurs de sa robe sont elles aussi plus symboliques que tirées de la réalité : le cheval blanc a une valeur positive. Le mélange fantaisiste de couleurs n'est pas un obstacle : ainsi lit-on dans le Roman de Troie : « Ne neif ne cignes n'est si blans / Corne ils aveient toz les flans / Ferranz e bais e pomelez / Orent cous, cropes et costez » ; le cheval de Camille de l'Eneas est blanc, noir, rouge, violet à reflets verts, fauve, avec quatre balsanes. Le cheval littéraire est aussi parfois un cheval fantastique, pouvant porter quatre ou sept chevaliers. Ainsi le cheval «faé» est un animal ayant des caractéristiques hors du commun, faisant plus que le cheval réel, possédant une robe aux couleurs multiples, rares. Derrière les descriptions littéraires se devine un substrat à caractère savant. Le moyen âge est héritier d'une tradition encyclopédique antique (Pline, Aulu-Gelle, Solin, etc.), puis d'une tradition patris- tique, les Etymologies d'Isidore de séville étant très souvent citées. Dans la seconde moitié du xiie s. se fait la découverte d'Euclide, Ptolémée, l'aristotélisme étant souvent teinté de néoplatonisme, ceci se produisant à travers Avicenne, Ibn Gabirol et Averroès. Le cheval, quasiment absent des bestiaires, apparaît dans la seule tradition encyclopédique. Raban Maur, successeur d'Isidore, moralise le savoir isidorien, et extrait de la Bible les citations où figurent des chevaux. À la fin du XIIe s., Alexandre Neckam (De naturis rerum), fait des remarques nouvelles à partir d'Isidore, Virgile, Aristote, écrivant sous un angle anecdotique et un angle moralisateur. Les encyclopédistes du XIIIe s. dont les sources sont communes, ont toutefois un regard différencié ; mais les rubriques traitées sont en général de quatre ordres : mœurs, caractère, comportement ; description, anatomie, âge ; mode de reproduction ; matière médicale. Il apparaît en tout cas que le cheval « didactique » est plus littéraire que réel, à part quelques exceptions. On notera, pour ce qui est de la médecine, Vincent de Beauvais (à partir des sources les plus courantes), et surtout Albert le Grand, source essentielle pour la Chirurgie des chevaux.


Description

Plus pratique est un auteur comme Pierre de Crescens (XIIF-xrv6 s.), traitant du cheval et de l'économie rurale. Son ouvrage, VOpus ruraliwn commodorum, sera traduit à la demande de Charles V en 1373. De façon globale, il semble que tout ce que la littérature peut présenter sur les caractéristiques et qualités du cheval vienne en droite ligne des encyclopédies. L'hippiatrie a une histoire très ancienne ; en témoigne la stèle babylonienne portant le code d'Hammourabi, qui nous apprend qu'il existait dans le royaume des vétérinaires v. 1800 avant Jésus-Christ. Les Grecs ont ressenti assez tôt le besoin d'avoir des médecins spécialisés dans le soin du cheval. Parmi les textes qui en témoignent, citons ceux de Simon d'Athènes, Xénophon (445- 354 av. J.-C), auteur d'un véritable traité d'hippologie, mais aussi de dressage et d'équitation, puis Aristote {Histoire des animaux, traitant plus des maladies et de leurs symptômes que de thérapeutique). Les Hippiatrica, recueil réalisé par Oder au début de notre siècle, rassemblent des textes hip- piatriques grecs pour la plupart d'origine byzantine, datant du IIe au Ve s. de notre ère, qui auraient utilisé des sources anciennes grecques et babyloniennes. Le plus célèbre de ces auteurs est Apsyrtos, vétérinaire en chef dans l'armée de Constantin Ier. Chez les Romains, les vétérinaires sont moins nombreux et moins spécialisés que chez les Grecs, du fait de la faible importance de la cavalerie dans les armées romaines. Columelle, Vairon, Palladius, sont surtout théoriciens et agronomes ; en revanche Végèce a signé un véritable ouvrage de médecine vétérinaire ou plutôt recueil de recettes. Les hippiatres grecs et les agronomes grecs et romains proposent une véritable médecine. Durant le haut moyen âge, il n'y a pas de développement significatif de la médecine des chevaux. Prières, offrandes, recours aux saints, prédominent. Durant tout le moyen âge, on fera appel à ces aides et au savoir des maréchaux. Les Arabes représentent un apport important ; chez eux le savoir vétérinaire est avancé, savoir issu de l'antiquité, mais présentant des innovations. Citons Mohammed Ibn Jakoub au VIIe s., et surtout le Nâcérî d'Abou Bekr ibn Bedr (XIIIe ou premier tiers du XIVe s. de notre ère), traité comportant une grande partie consacrée à l'hippologie. En Occident « le maréchal, tel que sera un Jorda- nus Rufus au xme s., praticien habile et savant, prend peu à peu naissance, forme, dans ce processus de contact et de maturation». Du Xe au XIIe s., période d'évolution, on peut citer deux manuscrits anglais de recettes concernant les animaux, et la Physica d'Hildegarde de Bingen. Du xine au xve se multiplient encyclopédies et traités de médecine vétérinaire (foyer scientifique au début du XIIIe s. en Sicile). Roger II, puis Frédéric de Hohenstau- fen, donnent l'impulsion à ce savoir. Le principal représentant de cette médecine à la cour de Frédéric II est Jordanus Rufus, auteur du De medicina equorwn, œuvre d'une grande renommée. Traduite en de nombreuses langues (en français sous le titre La mareschaucie des chevax), on y trouve les germes d'une véritable médecine vétérinaire scientifique. Albert le Grand, contemporain de Rufus, n'a pas connu son œuvre ; son De animalibus est une compilation d'oeuvres savantes. Mosé de Païenne, médecin juif du XIIIe s., Johan Alvares de Salamiellas (auteur d'un traité richement illustré), Manuel Diaz de Calatayud, Guillaume de Villiers, pour le XVe s., sont les derniers auteurs évoqués avant l'introduction de la Chirurgie des chevaux. Cet ouvrage est présenté ainsi : le manuscrit ; l'auteur (tout à fait anonyme ; peut-être s'agit-il de plusieurs personnes ayant recopié des recettes) ; le plan ; les sources ; le sommaire comparé du traité et du De animalibus d'Albert le Grand (dont le chapitre De equo est presque entièrement traduit dans la Cirurgie des chevaux) ; la langue ; la matière médicale ; le texte. Suit un glossaire, fort utile, puis trois annexes. Ce sont : VOpus ruralium commodorum de Pierre de Crescens (partie consacrée au cheval) ; le cheval dans l'encyclopédie de Jean de Corbechon, Le livre des proprietez des choses (traduction du De proprietatibus rerum de Barthélemi l'Anglais) ; enfin la traduction en français du De equo tiré du De animalibus d'Albert le Grand. On reconnaît dans ces traités des maladies connues (suros, atteintes, emphysème, éparvin, morve, bleime, etc.) ; on y propose des remèdes, très souvent d'origine animale ou végétale. Mais on trouve aussi des conseils pour la capture, la garde, le dressage du cheval. La description des allures montre que l'on ne décomposait pas correctement le galop, puisque, comme on le sait, il faut attendre la photographie et la fin du XIXe s. pour l'analyser avec exactitude. Nous terminerons cette recension par de légères critiques. Nous avons remarqué quelques répétitions d'un chapitre à l'autre, parfois au niveau des notes ; une inversion dans les légendes des planches (cheval entravé et saillie), enfin des fautes d'orthographe un peu ennuyeuses (par exemple exibe, apesantir) ; des impropriétés de langage (affectation au lieu d'affliction) ; des erreurs (desquels là où il fallait desquelles). Ces défauts toutefois n'altèrent pas l'impression très favorable que laisse cet ouvrage, fort intéressant et très appréciable sur le plan de la synthèse comme nous l'avions souligné.

Bernadette Mora, http://www.persee.fr



Détails
EtatNeuf
RéférenceM10
EAN9782868783240
ISBN9782868783240